LE CENTRE DE TRI ET DE PRÉPARATION DE CSR DE MONTE :

L’AVIS DE CORSICA PULITA :

Nous avons détaillé précédemment l’ineptie et les dangers que représente l’incinération des
déchets sous la forme de Combustibles Solides de Récupération (CSR) en Corse. Le Syvadec
lance le 3 janvier une concertation préalable à la construction du premier centre qui doit
fabriquer ces CSR, à Monte.
Il s’agit d’une occasion de prouver que ce projet ne tient pas la route : il enrichira
massivement quelques entreprises au grand détriment de notre environnement, de notre
santé et de nos finances.

NOTRE ANALYSE

De quoi parle-t-on ?

Le centre de tri est l’étape qui permet de préparer le combustible solide de récupération (CSR) qui alimentera les fours et de recycler une partie des déchets reçus.
La chaleur dégagée par l’incinération alimentera une centrale vapeur qui permettra la production d’électricité.

Personne n’a encore étudié en Corse la faisabilité des deux incinérateurs prévus au Projet de Plan Territorial de Prévention et de Gestion des Déchets… mais le Syvadec voudrait déjà produire les combustibles !

Pour cela, le centre de tri traiterait dans 3 salles de tri distinctes :

  • Les ordures ménagères résiduelles (poubelle noire),
  • Les emballages (poubelle jaune),
  • Le tout venant de déchetteries et les Déchets des Activités Économiques hors déchets
    du bâtiment.

Le Syvadec a refusé de transmettre aux associations le détail du marché public de conception, réalisation, exploitation et maintenance de 248 775 573 euros qu’il a signé avec AM Environnement (mandataire) et ses co-traitants : RIVAT architecte, ENGIBAT (BE construction et économiste), ENERGIPOLE (BE conception et réalisation tri), RMIS (équipementier tri emballages), SUEZ (exploitation), NATALI (BTP, GC et VRD), FUSELLA (constructions métalliques), SCAE (électricité), Trident service (MOE général).

Les informations dont nous disposons permettent déjà de cerner les lacunes, les graves omissions et pièges de ce projet.

Des irrégularités majeures : 

Le terrain d’assiette est inconstructible, car classé en Espace Stratégique Agricole (ESA). Comment l’Etat peut-il financer à 80 % un projet de construction d’un équipement de cette importance sur un terrain inconstructible ? Pourquoi aucun élu du SYVADEC ne pose-t-il la question de la constructibilité du terrain ?

Voir l’analyse détaillée publiée par U LEVANTE

  • Le Plan Déchets actuellement en vigueur, datant de 2015, interdit tout procédé d’élimination thermique des déchets. Tant que le futur plan qui prévoit deux incinérateurs n’est pas définitivement approuvé et que les délais de recours ne sont pas purgés toute dépense effectuée et tout acte d’engagement signé par le Syvadec pour produire des combustibles sont sans fondement juridique.

Que se passera-t-il pour le marché du centre de tri si le projet de Plan Territorial des déchets est rejeté ?

Des éléments techniques et financiers absolument anormaux

 1. Le montant du marché est hors normes

Le montant du marché de conception-réalisation du centre de tri de Monte est ainsi
ventilé :

Montant initial HT annoncé par le
Syvadec et financé à 80 % par l’État
Montant du marché initial signé
(hors avenants et révision éventuelle des prix)
Charge foncière – Achat terrain* 646 060 NC
Autres (AMO,
géomètres, géotechniques…)*
573 175 NC
Études, conceptions, procédures 4 872 532 4 481 959
Terrassement et VRD, Génie civil,
Bâtiment tous corps d’Etat ,
équipements et process, réseaux et
contrôles
57 899 996 55 122 250
Essais, performances, mises-en
services
936 354 857 067
TOTAL 67 997 482
Sous total des postes concernés par
le marché principal :
63 708 882 60 461 276

*Postes à charge du Syvadec hors marché principal

Rapporté à la tonne de déchets traitée, cet investissement est le double des prix moyens sur le continent !

En effet, ce prix est hors normes par rapport aux tonnages traités annoncés par le
Syvadec :

– Ordures ménagères résiduelles : 57 500 tonnes
– Emballages : 6 600 tonnes (seulement)
– Déchets des activités économiques : 5 500 tonnes
– Bois : 4 000 tonnes
– Tout venant : 6 000 tonnes
– Biodéchets : 4 000 tonnes
– Déchets verts : 4 000 tonnes
Soit un total à traiter de 87 600 tonnes.

En plus de ces déchets, 10 100 tonnes seront en transit sur l’installation : verre, cartons, papier mais ne sont pas concernés par les lignes de traitement. Les professionnels ont l’habitude de travailler avec des coefficients qui permettent d’évaluer en première approche le coût nécessaire pour une installation : à chaque type de produit à traiter, une prévision moyenne d’investissement rapporté au tonnage annuel traité.

En suivant cette méthode, et par rapport aux objectifs annoncés par le Syvadec, le prix total de l’installation, en fonction des options, devrait se situer dans une fourchette maximale de 26 à 32 millions d’euros, soit moins de la moitié du prix annoncé !

Nous rappelons qu’un programme détaillé pour un centre de tri de haute performance établi par l’Office de l’Environnement de la Corse en 2016 pour 70 000 tonnes (flux aux caractéristiques identiques à ceux du centre de tri de Monte mais avec un niveau de tri très supérieur et sans préparation de CSR) était évalué à 14,2 millions d’euros, bâtiment de 5 900 m2 compris. Avec des performances inférieures, ce montant est de 60,4 millions d’euros aujourd’hui avant éventuelles révisions de prix ! Un tel surcoût est incompréhensible.

Le Président du Syvadec ne nous a pas transmis le détail des postes concernant la construction et le process. Pour la construction, l’ensemble des postes VRD/ Bâtiment était initialement évalué par le Syvadec à plus de 22 millions d’euros. Si l’on rapporte les surfaces habituellement retenues dans les centres de tri aux tonnages annoncés par le Syvadec dans sa note, le seul coût du bâtiment (19,2 millions) serait d’environ 4 500 euros le m2 !

Des projets récents de centres de tri privés de même tonnage sur le Continent (surfaces de bâtiment de 5 000 m²/ hauteur 12 m, bureaux, locaux du personnel, salles de contrôle, portes automatiques, trappes de désenfumage, mise en dépression, électricité et éclairage intégrés sortent à… moins de 2 000 euros le m2.

Pour le process, évalué par le Syvadec à 33,8 millions d’euros, les performances de tri étant très faibles, le prix du process est excessivement élevé. À titre d’exemple, les seules modélisations dont nous disposons à la date d’aujourd’hui montrent que sur l’ensemble des salles de tri, tous flux confondus, seuls 4 à 6 tris optiques seraient installés.

Sur les seules lignes emballages, les centres de tri performants récemment construits disposent de 9 à 11 tris optiques ….

Nous reviendrons prochainement sur ces questions de prix.

2. Des explications exigées sur les DAE (déchets des activités économiques) !

On est très surpris de découvrir 2 chiffres fort étonnants dans la note de présentation du SYVADEC :

– Les CSR produits à Monte atteindraient « seulement » 18 577 tonnes alors que le projet de PTPGD en prévoit 154 000 tonnes en Corse à répartir sur deux installations de tri et deux installations d’incinération !

– Les Déchets des Activités Économiques (DAE) à traiter sur l’usine de Monte totaliseraient 5 500 tonnes. Or le Projet de Plan estime le gisement à 39 000 tonnes pour le Grand Bastia, 17 000 tonnes pour la Balagne et le Centre, 21 000 tonnes pour la plaine Orientale et le Cortenais (pages 48 et 51 du projet de
PTPGD) soit un total de 77 000 tonnes qui devraient en toute logique être dirigées vers le centre de tri de Monte… Et produiraient 35 000 à 40 000 tonnes de CSR supplémentaires !

Le Syvadec doit nous expliquer où seront traités les tonnages de DAE manquants. Le groupement attributaire du Marché est-il autorisé à traiter des gisements d’origine privée dans l’usine de Monte ? Si tel est le cas, pour quels tonnages ? A
quelles conditions économiques ?

L’introduction de 71 500 tonnes supplémentaires de DAE dans l’usine justifie-t-elle les surcoûts d’investissement que nous constatons ?

L’argent public sert-il directement les intérêts privés ?

Le CTV de Monte : une meilleure maîtrise du coût de gestion des déchets , vraiment ?

https://www.registre-dematerialise.fr/5065/download/component/46517/plaquette-pour-une-valorisation-optimale-de-nos-dechets.pdfEn page 3 de la plaquette de présentation du CTV de Monte , le Syvadec affirme : « De cette manière, l’augmentation du budget destiné au traitement des déchets, qui serait très importante sans ces équipements, sera maîtrisée. »

Vérifions :
Page 33 du document du Syvadec « Evolution des contributions » de mai 2023, le syndicat précise : « Compte tenu des coûts de fonctionnement actualisés associés au CTV, le niveau des contributions évoluerait à la hausse pour atteindre:sur la période 2023-2028 : + 7 millions d’euros, soit +15, 96% (dont +5 millions d’euros entre 2023 et 2026 soit 11, 40%) Niveau de contribution nette 2025 : 48,9 Millions d’euros(- 2 millions d’euros par rapport au fil de l’eau »

« La mise en service du CTV de Bastia permet de ralentir la hausse des dépenses avec un rythme de 3% par an » (Page 36) Heureuse nouvelle ! +3% par an !

Donc le coût de traitement des déchets ne va pas baisser , au contraire il va continuer à augmenter. C’est la hausse de ce coût qui…ralentit !

Le Syvadec se moque des corses et des EPCI traitées comme des vaches à lait !

Le Centre de Tri de Monte et le respect de l'environnement: mission impossible

Dans ces documents de présentation, le Syvadec présente la réalisation et l’exploitation de ce centre de tri comme exemplaires en ce qui concerne le respect de l’environnement.

Pour ce faire, le Syvadec occulte, notamment,

  • Que ce centre de tri artificialise 5 ha d’Espaces Stratégiques Agricoles dans le secteur d’Angiolasca ce qui constitue une violation indiscutable du Padduc, les ESA étant inconstructibles.
  • Que la zone concernée fait partie d’une A O P vins de Corse et donc, pour cette raison aussi , est inconstructible,
  • Que l’artificialisation de cette zone entraine des risques d’inondation détaillés dans l’avis de la MRAE du 18/11/2021,
  • Qu’ aucune information n’est donnée sur les mesures prises pour limiter les effets de l’imperméabilisation et démontrant la prise en compte de ce risque inondation,
  • Que ce CTV est prévu pour être situé à proximité de résidences pour séniors, d’écoles et de logements individuels qui devront subir les nuisances olfactives et sonores produites par lui,
  • Que le Syvadec se garde bien de préciser combien de camions de transport des déchets circuleront , chaque jour pour transporter les déchets,
  • Que la solution du transport des déchets par train est une hypothèse qui n’a reçu, à ce jour aucune validation de la part de la CDC.

Sur la filière CSR :

Cette filière est présentée comme la solution incontournable et vertueuse .

Le syvadec occulte le fait qu’il a choisi cette filière et attribué le marché du CTV de Monte sans avoir fait procéder à des études de faisabilité ! Il a attendu le 15/09/2022 pour solliciter une subvention pour que soient réalisées ces études qui, à ce jour, n’existent toujours pas !

Violant le principe de proximité (L 541-1 Code de l’environnement), le Syvadec reconnaît que les CSR seront expédiés « vers des unités de valorisation hors de Corse (chaudières dédiées, cimenteries)(Page 6 du projet de construction du CTV)

Le Syvadec se garde bien de préciser quel sera le coût de ce transport peu respectueux de l’environnement.

Pour quelles raisons le Syvadec a-t-il enterré les solutions apportées par son étude de mars 2017 qui démontrait que la crise des déchets pouvait être résolue sans filière CSR et pour beaucoup moins cher ?

Rappel :

En mars 2017,à la demande du Syvadec, la société Anteagroup a procédé à une analyse de la crise des déchets et proposé des solutions chiffrées prenant en compte le fait que « le  PPGDND en vigueur sur la Corse ne permet pas la valorisation énergétique des CSR sur le territoire, ni aucun traitement thermique. » (Page 32)

Cette « étude pour la définition des meilleurs systèmes de réduction de la part résiduelle des ordures ménagères par prétraitement » concluait qu’il était possible de retenir 3 solutions :

Bassin Grand Bastia  :

pré -tri , traitement et stabilisation pour un coût de 16- 20 millions d’euros pour le traitement de 60 000 t OMR/an.
(Avec le Bassin Ouest:coût total :39-49 millions d’euros).

Pré-tri , traitement et compostage:21-25 millions d’euros.
(Avec le Bassin Ouest:coût total :48-58 millions d’euros)

Pré-tri, traitement et méthanisation : 26-29 millions d’euros.
(Avec le Bassin Ouest : coût total :59-69 millions d’euros).

Pour rappel , le CTV de Monte coûte, à lui seul, 68 millions d’euros ! Sans compter le coût de l’export des CSR et des mâchefers + Refiom !

Pour quelles raisons le Syvadec a t-il enterré le plan d’actions de cette étude ?
Parce que ces solutions ne satisfaisaient pas les appétits des groupes privés ?
Parce qu’elle démontrait qu’il était possible de ne pas recourir à la filière CSR si coûteuse ?

Le Syvadec et le respect de la hiérarchie des compétences

1: Contexte et Opposition au Syvadec

En application des articles L 4424-37 du code général des collectivités territoriales, R 541-13 et 541-15 du Code de l’environnement, le Plan de prévention et gestion des déchets est opposable à toutes les décisions publiques prises en matière de déchets, d’autorisations environnementales ou d’installations classées pour la protection de l’environnement. Le plan a pour vocation d’orienter et coordonner l’ensemble des actions menées tant par les pouvoirs publics que par les organismes privés.

2: Actions du Syvadec

Le Syvadec, sans attendre que le PTPGD ne soit définitivement voté, n’a pas hésité à programmer le marché du CTV de Monte et à l’attribuer !

Le Syvadec prétend donc respecter le plan alors qu’il n’est encore, à ce jour, qu’un projet et que le seul plan opposable en l’état est le plan de prévention et gestion des déchets de Corse approuvé en 2015 comme la MRAE l’a rappelé dans son avis du 18/11/2021, plan qui ne valide pas la filière CSR.

Cette tentative de passage en force du fait du Syvadec est inacceptable.

3 : Opposition de la CDC et Violation des Compétences

Le Syvadec occulte aussi le fait que la CDC, dans le cadre de son recours gracieux en date du 8/08/2023, a dénoncé cette politique visant à imposer ses choix malgré l’absence de nouveau plan voté, ce qui prive, de facto, le PTPGD d’effet utile et caractérise une violation des compétences de la CDC et du principe de libre administration des collectivités.

Toujours dans le cadre de son recours, la CDC dénonce le fait « qu’indépendamment du coût d’investissement du projet de CTV de Monte, son coût de fonctionnement, annoncé à environ 20 millions d’euros par an, pourrait conduire à doubler le coût de traitement des déchets pour les intercommunalités, et rendre totalement inatteignables, à défaut d’une réflexion d’ensemble y compris en termes de moyens humains et budgétaires, toute montée en puissance du tri à la source ».

4 : Appel à la Mobilisation

Les élus et les citoyens doivent se mobiliser pour s’opposer à ce passage en force du Syvadec, à ces dérives catastrophiques pour l’environnement et insupportables pour les ménages !

NOTRE AVIS

Personne n’a encore étudié en Corse la faisabilité des deux incinérateurs prévus au Projet de Plan Territorial de Prévention et de Gestion des Déchets… !

AIDEZ NOUS !

Le meilleur moyen de nous aider à faire changer les choses, c’est de donner votre avis sur le registre d’enquête publique  !

S'ENGAGER !

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